Très tôt les hommes ont compris l’intérêt de mélanger les épices, pour multiplier les saveurs et pour simplifier l’usage des épices en cuisine. Chaque culture a développé ses propres recettes, étroitement associées à son patrimoine culinaire.
Parcourir une liste de mélanges d’épices, c’est faire à la fois un tour du monde et un voyage dans le temps :
En Europe, le français Quatre-Épices est devenu incontournable pour parfumer terrines et plats mijotés, comme les Herbes de Provence est un classique pour les grillades, le mélange Paella dans la cuisine espagnole et les épices pour pain d’épices en Europe du Nord …
De l’autre côté de la Méditerranée, la cuisine d’Afrique du Nord a ses Ras el Hanout (« la tête de l’épicerie ») pour parfumer tajines et couscous, tandis qu’au Proche-Orient le Zaatar assaisonnera boulettes de viande et légumes ou accompagnera le pain libanais « man’ouché » ou « mana’ich ».
En Afrique Occidentale, le mélange Yassa facilitera la tâche de ceux qui veulent préparer le plat de poulet éponyme, tandis que Berbéré ou Mit-Mita feront voyager dans l’Ethiopie millénaire.
En route vers l’Asie, le sous-continent indien est célèbre pour sa tradition de mélanges d’épices, qui se disent masala en hindi ou kari en tamoul, anglicisés sous le Raj en curry.
Un proverbe dit d’ailleurs que « pour être un grand cuisinier, il importe d’abord d’être un excellent masalachi, c’est à dire un parfait mélangeur d’épices ».
A chaque région son mélange, avec une majorité d’épices cultivées localement, qui ne sont pas les mêmes au Sud (cardamome, curcuma, poivre …) qu’au Nord (cumin, nigelle, ajowan …). Au Nord le Garam Masala (« épices chaudes ») pour plats mijotés, le Tandoori pour grillades au four, le Korma pour plats de fête riches en crème et fruits secs ; au Sud le Curry de Madras, fruité, le Vindaloo de Goa qui rappelle la présence portugaise, le Vadouvan de Pondichéry, adaptation pour les Français des masalas locaux, à l’Est le Panch Phoron du Bengale, mélange de graines indissociables des plats végétariens ou encore plus au sud, au Sri-Lanka les curry noir ou curry torréfié sans fenugrec à la différence de la plupart des masalas indiens!
L’Asie du Sud-Est est l’autre contrée des currys, tout particulièrement la Thaïlande, avec des currys verts, jaunes ou rouges préparés au lait de coco, mais aussi Singapour et la Malaisie.
L’Indonésie est l’autre grand pays des épices : c’est des Îles Moluques que sont originaires noix de muscade et clous de girofle. C’est dans l’archipel que l’on trouve le nasi goreng et les mille sambals à base de piments rouges et le mélange Satay aux cacahuètes pour de succulentes brochettes de viandes.
La sophistication de la cuisine chinoise explique peut-être qu’il y existe peu de mélanges, mis à part le Cinq Parfums qui fait la part belle aux baies de Sichuan et à la badiane, pour la préparation du canard laqué. C’est un des plus anciens mélanges connus qui symbolise pour les Chinois les cinq éléments, en particulier du fait de l’association des classiques cinq types de saveurs : aigre, amer, doux, piquant et salé.
La cuisine japonaise est, elle, avare en épices, mis à part piment et « poivre » Sansho, mais fait grand usage de currys et de son 7 épices, le Schichimi Togarashi, aux notes d’agrumes et de piments.
Enfin, de l’autre côté du Pacifique, l’Amérique du Nord s’est prise au jeu des mélanges d’épices, notamment pour leur simplicité d’utilisation. Il est partout possible de récréer la cuisine des bayous de Louisiane avec le mélange Cajun, les plats de haricots texans avec le mélange pour chili con carne, les innombrables variantes de mélanges BBQ, voire donner à ses fricassées des notes canadiennes de sirop d’érable avec le mélange du trappeur.